Chk

3/25/2013

Fibrome : L'embolisation artérielle, une technique sans bistouri

Touchant plus d'une femme sur trois après 35 ans, les fibromes utérins peuvent parfois devenir problématiques : douleurs pelviennes, règles abondantes… Pour les prendre en charge, la chirurgie est souvent nécessaire. Mais depuis une dizaine d'années, une alternative existe : l'embolisation.



Développée initialement pour traiter les hémorragies de la délivrance, l'embolisation artérielle permet de traiter les fibromes sans recourir à une chirurgie lourde.

Des microbilles dans un cathéter pour affamer les fibromes

Mise au point au début des années 1990 à l'hôpital Lariboisière de Paris par les équipes de gynécologie et de radiologie, l'embolisation consiste à injecter des microbilles synthétiques dans les artères de l'utérus. Cette opération se fait par l'intermédiaire d'un fin cathéter d'environ 1 millimètre de diamètre, introduit sous anesthésie locale. En recevant le sang venant des artères utérines, le fibrome aspire également les billes (ou sphères d'embolisation de 500 à 1 000 microns de diamètre) qui vont boucher ses canaux d'approvisionnement et littéralement l'asphyxier. Le fibrome se nécrose alors et rétrécit. Cette technique permet de bloquer la vascularisation de tous les fibromes aussi nombreux et petits soient-ils, évitant ainsi les risques de récidive.

L'embolisation artérielle nécessite une approche pluridisciplinaire du traitement en mettant à contribution radiologue et gynécologue.





Un radiologue vasculaire interventionnel peut réaliser cette intervention. Ce professionnel de santé est spécialement entraîné à la navigation dans les vaisseaux et aux traitements par voie radiologique. Une petite piqûre est pratiquée au niveau du pli de l'aine sous anesthésie locale et le cathéter est introduit. Sous contrôle radiologique, il va naviguer jusqu'aux vaisseaux sanguins qui nourrissent le fibrome utérin. Les sphères d'embolisation sont alors libérées et s'accumulent jusqu'au blocage du flux sanguin. Le radiologue surveille la progression de ces particules. En fonction du nombre de fibromes et de leurs positions, l'intervention dure entre 40 minutes et deux heures. L'hospitalisation dure 1 à 3 jours et la convalescence n'excède pas une petite semaine.

Embolisation artérielle ou hystérectomie ?

L'embolisation peut être proposée à des femmes jeunes, qui souhaitent conserver leur utérus, pour des raisons de croyances personnelles ou pour d'éventuelles grossesses. "Certaines femmes ne peuvent pas supporter l'idée d'avoir encore des tumeurs en elles et préfèreront une myomectomie voire une hystérectomie. Mais d'autres ne veulent pas perdre leur utérus, c'est pourquoi il faut intégrer l'embolisation dans l'information préopératoire" explique le Dr Larousserie, gynécologue obstétricien de l'Hôpital des 4 villes à Sèvres. Cette intervention peu invasive préserve l'état de l'utérus, contrairement à la myomectomie qui peut rendre l'utérus cicatriciel et donc impropre à une grossesse. De nombreuses femmes ayant des fibromes et subi une embolisation ont eu par la suite des enfants.

L'hystérectomie est à privilégier pour les femmes d'un âge plus proche de la ménopause et/ou qui ne souhaitent plus avoir d'enfants. L'embolisation reste une alternative et non pas un remplacement de l'hystérectomie. L'indication médicale se fait au cas par cas, selon l'âge, le désir de grossesse, le nombre et la taille des fibromes...

Les bénéfices de l'embolisation artérielle

La plupart des études montrent que 78 à 94 % des femmes traitées par embolisation présentent une amélioration nette ou une guérison totale des hémorragies, des douleurs et autres symptômes. Trois mois après l'intervention, on observe une nette réduction du volume du fibrome. Selon deux études américaines1,2, la normalisation des règles serait obtenue dans 85 % des cas, la réduction du volume de l'utérus est de 45 % en moyenne, le taux d'échecs est de 5 à 10 % alors que près de 90 % des patientes seraient satisfaites du résultat et recommanderaient l'embolisation à d'autres femmes.

Des douleurs pelviennes sont fréquentes après l'embolisation, elles peuvent être traitées par des anti-inflammatoires ou des antalgiques. Du fait des crampes parfois violentes, la patiente demeure généralement une ou deux nuits à l'hôpital où elle reçoit un traitement intraveineux contre la douleur. Plus rares, d'autres complications passagères peuvent intervenir : fièvre, nausées... Les résultats d'une étude3 menée en 2006 aux Pays Bas montrent que les femmes ayant subi une embolisation souffrent moins durant les 24 heures qui suivent l'opération, et reprennent plus rapidement une activité quotidienne normale, que celles qui ont subi une hystérectomie. La majorité des femmes reprennent leur activité au bout d'une semaine, contre deux à quatre semaines de convalescence pour une myomectomie (ablation des fibromes par chirurgie) et quatre à six semaines pour une hystérectomie (ablation de l'utérus).

Embolisation artérielle : de rares complications

Parmi les complications plus rares, on peut noter des cas d'aménorrhée (arrêt des règles, même si dans 80 % des cas les règles réapparaissent dès le cycle suivant l'opération), d'infection généralement enrayée par un antibiotique ou encore une nécrose de l'utérus qui entraîne alors l'hystérectomie que l'on cherchait à éviter.

L'embolisation reste une opération, et ne bénéficie donc pas d'un risque nul, mais le risque de mortalité lors de cette intervention reste 10 fois inférieure à celle de l'hystérectomie. Le risque de complications pour une embolisation est de 19 % tandis qu'il est de 26 % pour une hystérectomie4. Les décès survenus à la suite de complications d'une embolisation, sont dus soit à des septicémies survenant chez des femmes ayant des antécédents d'infections gynécologiques et qui ont tardé à consulter soit à des embolies. Pour éviter ces dernières, des anticoagulants peuvent être administrés à la femme les jours suivants l'intervention.

Actuellement, une cinquantaine de centres en France pratique l'embolisation des fibromes utérins. Cette technique a fait l'objet d'une étude par la Haute Autorité de Santé et est désormais autorisée et remboursée par l'Assurance Maladie.

Aux Etats-Unis, on compte près de 1 500 femmes traitées par embolisation par mois. En France, le même nombre de femmes bénéficient de cette technique mais par an ! Un faible chiffre par rapport au nombre de femmes qui pourraient en profiter. Cette technique représente une nouvelle arme contre les fibromes et permet aux femmes de conserver leur utérus. Outre sa valeur symbolique, cet organe est indispensable à toute grossesse. Mais compte-tenu du manque de recul (faible nombre de naissances...), on ne peut déterminer si ces grossesses ne comportent pas plus de risques et cette technique reste pour le moment recommandée aux seules femmes n'ayant plus de désir d'enfant.

David Bême - 15 février 2006 - Mis à jour le 14 avril 2009

1 - Radiology, February 2003, vol.226, n°2, pp.425-431
 2 - Fertility and Sterility, January 2003, vol.79, n°1, January 2003
 3- Pain and Return to Daily Activities after Uterine Artery Embolization and Hysterectomy in the Treatment of Symptomatic Uterine Fibroids: Results from the Randomized EMMY Trial, CardioVascular and Interventional Radiology, vol. 29, n°2, avril 2006
 4- A UK multicentre retrospective cohort study comparing hysterectomy and uterine artery embolisation for the treatment of symptomatic uterine fibroids (HOPEFUL study): main results on medium-term safety and efficacy, An international journal of obstetrics and gynaecology, vol.114, issue 11, octobre 2007

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Si ce contenu vous a inspiré quelque chose ou si vous avez des suggestions (nouveau sujet par exemple), exprimez-vous!

Dynamic Link